Spécialiste des généralités

Publié le par La Souris Blonde

A la fin de la séance et après le débat, comme dit Casanova, tandis que les auditeurs quittent peu à peu la salle, le monsieur vénérable passe entre les sièges, adressant, en hôte bienveillant, un mot à chacun de ceux qui, déja debout, tardent par petits groupes à finir leurs échanges, signalant sa connivence aux habitués du cercle, brisant la fine glace qui enveloppe encore les nouveaux venus.

Pour celui qui n'est jamais d'accord, il a un mot gentil sur les vertus de la contradiction. Une phrase sibylline pour celui dont on ne comprend pas les questions. Au spécialiste des détails un détail croustillant. Un article lu de la veille, ou du mois dernier, qui intéressera celui-ci. Une question pour celui-là, dont il ne se souvient plus bien ce qui l'intéresse.

Au tour de la souris, verte en ces lieux, de recevoir un mot d'amabilité.

"Il y avait beaucoup de jeunes femmes, aujourd'hui, c'est bien ! ça fait plaisir ! D'habitude, on est entre vieux bonshommes !"

Sourire poli. Puis, comme un écho, la souris entend la phrase resservir pour deux ou trois autres, qui sourient aussi gentiment au vieux monsieur réjoui de ce qu'il y ait eu, ce jour-là, contrairement à l'ordinaire, beaucoup de jeunes femmes, ce qui améliorait, à n'en pas douter, le décor.

Au féru de bibliophilie, il parlera de reliures. Au jeune scientifique nouvellement arrivé, quelques questions sur ses recherches. Pour l'étranger de passage il se trouvera des liens avec son pays.

Mais aux jeunes femmes de l'assistance, il n'aura su parler, finalement, que de leur jeunesse et de leur féminité, rien au-delà - dernier rempart contre lequel se heurte sa largesse d'esprit.
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
T
Et si, tout simplement, il ne savait pas (et n'avait jamais su) parler aux femmes ? Peut-être,(je dis bien peut-être) intimidé ou déconcerté par la présence de ces femmes dont il ne sait rien, a-t-il cherché quelque chose qui les retiendrait et les ferait peut-être revenir et empoussiéré dans ses clichés il a choisi ce qui, croyait-il, leur ferait plaisir : selon lui, le fait que l'on remarque leur jeunesse et leur féminité... non ???
Répondre
L
<br /> Oh oui, c'est bien le truc : le monsieur vient d'une époque où les écoles n'étaient pas mixtes...<br /> <br /> <br />
D
Ventre Saint-Gris ! Une souris de si bon goût recopiant ses billets sur un fond d'écran digne des napperons de la cantine de l'hospice de mémé !C'était mieux avant quoique malgré tous les souvenirs souvenirs, je ne regrette rien, non, rien de rien.Mais la couleur que je préfère, c'est le bleu, le bleu des bleuets !
Répondre
L
<br /> JF blonde bien sous tous rapports rencontrerait geek de bon goût pour maj blog et css si affinités... Les modèles prédéfinis d'OB sont bien limités...<br /> <br /> <br />
M
J'adore lorsque tu abordes ce genre de décryptage (non pas que les articles abordant des exemples de rue soient moins biens, juste qu'il me font me demander ce que ça ferait des dragueuses à la noix de même dissémination) !En y réfléchissant bien, c'est le genre de réflexion qui pourrait me passer par la tête (mais bon, plein de trucs débiles passent par la tête), que je pourrais sortir dans un contexte masculin de "on-joue-aux-gros-machos/monstres" (très plaisant entre gens ayant du recul), mais que je ne me vois mal sortir en public, étant donné le caractère diminuant de la phrase...
Répondre
L
<br /> C'est marrant, hein, comme une fois sortie de son contexte et un peu soulignée, cette phrase, finalement banale, tout le monde en remarque facilement l'énormité...<br /> Pourtant, sur le coup, ça passait plutôt bien... Enfin, dans ce milieu très masculin du moins...<br /> <br /> <br />
T
@Gorgonzolla : la phrase du vieux bonhomme est très sincère, sans le moindre doute. Mais je ne vois pas en quoi cela rachète sa muflerie...Aussi<br /> il aurait pu dire : "la prochaine fois, mettez un décolleté plus<br /> profond, jeune demoiselle, ça me fera plaisir", que c'eut été encore plus sincère, ne crois-tu pas ?Ce à quoi la souris aurait pu répondre, en toute sincérité :<br /> "alors là, mon vieux, ton décolleté, tu te le mets où je pense : je<br /> refoutrai jamais les pieds dans ce repaire de vieux croûtons bedonnants<br /> et libidineux, merci bien."Bref, ne crois-tu pas au final que, dans certaines situations, la sincérité est l'inverse de la courtoisie, voire frôle l'antipode du respect ?(par curiosité, j'aimerais qu'on me dise si les soulignés enrichissent réellement la démonstration)@La Souris Blonde : je<br /> ne te l'avais pas dit, mais elle est très jolie cette nouvelle<br /> tapisserie. C'est profond, cossu, presque bourgeois, et confortable pour le regard.Je te félicite pour ce choix.
Répondre
L
<br /> Disons que la phrase est sincèrement muffle et maladroite avec une désarmante honnêteté, comme l'est à peu près toute la tradition de galanterie française...<br /> Pour les soulignés: non. On dirait juste que tu cognes ta démonstration au marteau.<br /> Pour la tapisserie: merci, moi aussi j'aime bien son petit côté maison close, euh, je veux dire, maison bien isolée.<br /> <br /> <br />
G
Joli commentaire, Marquis, et salutations au passage.
Répondre