Quand peut-on boire du café ?
La question fut posée à la souris vendredi dernier, en ces lieux où un autre jeune homme officiait en compagnie de deux autres jeunes femmes. Lesquelles se gaussaient encore de lui – un peu comme si c'était une habitude, dans ce métier.
Et elles se gaussaient de lui parce qu'il était visiblement l'objet des avances d'une dame, avec laquelle il avait finalement accepté d'aller prendre un café, chose dont, aux dires de ses collègues, il n'avait nullement envie mais qu'il n'avait pas su refuser.
Le jeune homme : Mais c'est en tout bien tout honneur !
Collègue 1 : Ouais ouais, mon oeil !
Collègue 2 (à la souris) : Mademoiselle, franchement, proposer d'aller prendre un café, c'est en tout bien tout honneur ou pas ?
Oh, ça alors ! La réputation de la souris en matière de séduction serait-elle donc si étendue qu'on la reconnaîtrait à présent sur son lieu de travail pour solliciter ses conseils ? Ou serait-ce simplement une manière de passer le temps en échangeant ses bagages contre un joli ticket de consigne ? A quoi la souris répondit, donc :
La souris : Mais ça dépend, évidemment. (Vous vous attendiez à quoi ? Une réponse franche et nette de la part de la souris ? Allons, un peu de sérieux !) ça dépend du contexte dans lequel est formulée la question, et du ton employé. La plupart du temps, c'est très clair, dans la manière de poser la question, si c'est une proposition franchement malhonnête, avec une idée derrière la tête, ou si c'est juste pour discuter, un élan de sympathie, une envie de mieux se connaître.
Le jeune homme (requinqué) : Ah, d'accord ! Alors... On se prend un petit café ?
La souris (montrant l'exemple) : Non ! Vous voyez, là, on répond non !
(Jeune homme dépité)
La souris : Enfin, à moins que vous ayez vraiment très envie d'un café.
(Jeune homme reprenant espoir)
La souris : Non, non, je parlais de la personne avec qui vous allez boire un café tout à l'heure.
Mais oui, évidemment, la réponse correcte était : non. En fait, c'est un peu comme l'examen du code de la route : pour trouver la réponse correcte, il faut faire attention à toute sortes de petits détails, les panneaux sur le côté, regarder à travers le pare-brise de la voiture de devant si on voit le clignotant de celle qui la précède, si c'est de nuit, par temps de pluie, en ville, sur une autoroute ou une départementale non goudronnée depuis la guerre de 70... Bref, toutes ces petites choses que j'ai omis de mentionner dans les didascalies par pur goût du suspense.
En l'occurrence, le jeune homme avait posé sa question en se mettant légèrement de biais, le regard qui frise, un sourire en coin, et sur un ton entendu qui mettait presque le mot « café » entre guillemets (voilà, comme ça). A la rigueur, il aurait pu brandir un panneau indiquant « proposition indécente », ç'aurait à peine été plus clair. Une proposition de prendre un café accompagnée de ces signes par une personne que vous connaissez à peine, bien sûr que non, ce n'est pas en tout bien tout honneur ! Dans l'hypothèse maintenant ou vous seriez, par exemple, une souris non célibataire, répondre « oui » à cette question-là posée de cette manière-là, oui, c'est compromettant, car votre interlocuteur a manifesté clairement qu'il avait des vues sur vous. Il est donc de votre devoir de l'informer au plus vite qu'il va être déçu.
D'où la réponse surprenante que font souvent les jeunes filles aux dragueurs à la noix : « j'ai un copain ! » Qui donc leur a demandé si elles avaient un copain ? Que diable vont-elles nous parler de leur copain alors qu'on leur parlait de café ? Mais tout simplement parce que la séduction était explicitement implicite dans ce café-là. D'où l'apport d'une information qui change beaucoup la donne.
Il va sans dire qu'en cas de célibat, la même question, posée sur le même ton, acceptera aussi une réponse négative, la règle en ce cas étant la suivante : avez-vous vraiment envie, ou non, de vous faire draguer par cette personne, même le temps d'un café ?
Ça peut être tellement long, un café. Même un expresso. Même, oui, même un ristretto.
D'où aussi la difficulté de proposer un café à quelqu'un sans que la personne s'imagine qu'il s'agit d'un plan drague. Qu'est-ce qui attire si irrépressiblement le « non » dans la question posée par un dragueur ? Essentiellement le fait que cette question n'est orientée ni vers le café, ni vers le plaisir éventuel de passer un moment avec vous, mais vers le « plus si affinité » : le dragueur à la noix saute l'étape de la rencontre, il passe allègrement par-dessus vous pour montrer dès le départ que ce qui l'intéresse surtout, c'est ce qu'il pourra faire de vous après ce café.
Pour que le café passe, si j'ose dire, il suffit donc finalement de faire exactement le contraire : montrer que vous vous intéressez à la personne, que vous avez réellement envie de faire connaissance avec elle. Votre café a bien plus de chance d'être accepté s'il ne clignote pas de partout « proposition indécente, demi-tour interdit ». Mais là, bien sûr, on n'est plus du tout dans le domaine de la séduction.
Et elles se gaussaient de lui parce qu'il était visiblement l'objet des avances d'une dame, avec laquelle il avait finalement accepté d'aller prendre un café, chose dont, aux dires de ses collègues, il n'avait nullement envie mais qu'il n'avait pas su refuser.
Le jeune homme : Mais c'est en tout bien tout honneur !
Collègue 1 : Ouais ouais, mon oeil !
Collègue 2 (à la souris) : Mademoiselle, franchement, proposer d'aller prendre un café, c'est en tout bien tout honneur ou pas ?
Oh, ça alors ! La réputation de la souris en matière de séduction serait-elle donc si étendue qu'on la reconnaîtrait à présent sur son lieu de travail pour solliciter ses conseils ? Ou serait-ce simplement une manière de passer le temps en échangeant ses bagages contre un joli ticket de consigne ? A quoi la souris répondit, donc :
La souris : Mais ça dépend, évidemment. (Vous vous attendiez à quoi ? Une réponse franche et nette de la part de la souris ? Allons, un peu de sérieux !) ça dépend du contexte dans lequel est formulée la question, et du ton employé. La plupart du temps, c'est très clair, dans la manière de poser la question, si c'est une proposition franchement malhonnête, avec une idée derrière la tête, ou si c'est juste pour discuter, un élan de sympathie, une envie de mieux se connaître.
Le jeune homme (requinqué) : Ah, d'accord ! Alors... On se prend un petit café ?
La souris (montrant l'exemple) : Non ! Vous voyez, là, on répond non !
(Jeune homme dépité)
La souris : Enfin, à moins que vous ayez vraiment très envie d'un café.
(Jeune homme reprenant espoir)
La souris : Non, non, je parlais de la personne avec qui vous allez boire un café tout à l'heure.
Mais oui, évidemment, la réponse correcte était : non. En fait, c'est un peu comme l'examen du code de la route : pour trouver la réponse correcte, il faut faire attention à toute sortes de petits détails, les panneaux sur le côté, regarder à travers le pare-brise de la voiture de devant si on voit le clignotant de celle qui la précède, si c'est de nuit, par temps de pluie, en ville, sur une autoroute ou une départementale non goudronnée depuis la guerre de 70... Bref, toutes ces petites choses que j'ai omis de mentionner dans les didascalies par pur goût du suspense.
En l'occurrence, le jeune homme avait posé sa question en se mettant légèrement de biais, le regard qui frise, un sourire en coin, et sur un ton entendu qui mettait presque le mot « café » entre guillemets (voilà, comme ça). A la rigueur, il aurait pu brandir un panneau indiquant « proposition indécente », ç'aurait à peine été plus clair. Une proposition de prendre un café accompagnée de ces signes par une personne que vous connaissez à peine, bien sûr que non, ce n'est pas en tout bien tout honneur ! Dans l'hypothèse maintenant ou vous seriez, par exemple, une souris non célibataire, répondre « oui » à cette question-là posée de cette manière-là, oui, c'est compromettant, car votre interlocuteur a manifesté clairement qu'il avait des vues sur vous. Il est donc de votre devoir de l'informer au plus vite qu'il va être déçu.
D'où la réponse surprenante que font souvent les jeunes filles aux dragueurs à la noix : « j'ai un copain ! » Qui donc leur a demandé si elles avaient un copain ? Que diable vont-elles nous parler de leur copain alors qu'on leur parlait de café ? Mais tout simplement parce que la séduction était explicitement implicite dans ce café-là. D'où l'apport d'une information qui change beaucoup la donne.
Il va sans dire qu'en cas de célibat, la même question, posée sur le même ton, acceptera aussi une réponse négative, la règle en ce cas étant la suivante : avez-vous vraiment envie, ou non, de vous faire draguer par cette personne, même le temps d'un café ?
Ça peut être tellement long, un café. Même un expresso. Même, oui, même un ristretto.
D'où aussi la difficulté de proposer un café à quelqu'un sans que la personne s'imagine qu'il s'agit d'un plan drague. Qu'est-ce qui attire si irrépressiblement le « non » dans la question posée par un dragueur ? Essentiellement le fait que cette question n'est orientée ni vers le café, ni vers le plaisir éventuel de passer un moment avec vous, mais vers le « plus si affinité » : le dragueur à la noix saute l'étape de la rencontre, il passe allègrement par-dessus vous pour montrer dès le départ que ce qui l'intéresse surtout, c'est ce qu'il pourra faire de vous après ce café.
Pour que le café passe, si j'ose dire, il suffit donc finalement de faire exactement le contraire : montrer que vous vous intéressez à la personne, que vous avez réellement envie de faire connaissance avec elle. Votre café a bien plus de chance d'être accepté s'il ne clignote pas de partout « proposition indécente, demi-tour interdit ». Mais là, bien sûr, on n'est plus du tout dans le domaine de la séduction.