Petite musique ne nuit
Lorsque le métro arriva à quai, il était déjà bondé. ça tombait bien, en fait, puisque que le quai, lui aussi, était bondé. Le quai commença alors à faire des yeux doux à la rame de métro, soulignant leurs points communs, marquant leurs affinités, tâtant le terrain pour voir s'il y avait moyen. Pendant ce temps, leurs occupants respectifs se dévisageaient d'un oeil mauvais, bandant leurs muscles, qui pour élargir les interstices disponibles, qui pour les minimiser, chacun défendant son petit bout d'espace vital roulant.
Evidemment, c'est toujours dans ces moments-là qu'une personne sans cervelle vient se coller dans la mêlée avec un objet encombrant - armoire à glace portative, ratelier à fusils, diplodocus à bascule, drapeau de la CGT, bouée gonflable gonflée. Ce soir-là, l'objet encombrant était un instrument de musique, et la personne sans cervelle était la souris.
Evidemment, la souris fut aussitôt détestée par toutes les personnes de son environnement physique immédiat. Toutes? Non! Un petit jeune homme résistait encore et toujours à l'énervement métropolitain. Parce qu'un instrument de musique volumineux, c'est non seulement un appel à la lapidation publique dans le métro aux heures de pointes, mais aussi pain bénit, cadeau, accroche offerte à tout dragueur à la noix. Deux bonnes raisons de choisir l'harmonica.
Pourtant, celui-ci était gentil, courtois et désireux de tout, tout, tout savoir sur l'instrument de la souris, son accordage, la notation, est-ce que ça se joue en groupe, tout ça tout ça. Parce que - à ce moment, une petite carte de visite bariolée surgit avec la rapidité de l'éclair dans sa main qui à aucun moment n'avait semblé bouger - lui aussi, il faisait de la musique. Et il était désireux, oui, ô combien désireux d'avoir l'avis de la souris sur sa musique.
Ah mais pas n'importe quelle musique, attention. De la musique en live. De la musique sur scène. De la musique avec groupies en délire. D'ailleurs, c'était marqué à peu près partout sur la petite carte de visite: "avec groupies en délire". La pose du jeune homme sur la photo, la typographie, le choix du pseudonyme, tout convoquait l'imaginaire de l'artiste à groupies en délire.
Oh, ce serait mesquin, bien sûr, de sous-entendre que certains garçons (ou filles d'ailleurs) font de la musique uniquement pour avoir un fan-club, et choisissent les titres de leurs chansons, les visuels de leurs clips, le romanesque de leurs thématiques comme autant de pièges à glue pour le sexe opposé. Tout aussi mesquin, bas et déloyal de supposer que les mêmes se baladent toujours avec une bonne provision de cartes de visites dans leur poche, clignotant de l'adresse de leur site, leur myspace, leur msn, leur mail, et les tendent comme une faveur spéciale à de futures potentielles groupies en délire, avec un air généreux, car toi, oui, toi, tout spécialement, tu pourrais être choisie par moi pour être, oui, toi, tu as bien compris, celle pour qui je chante, mon oreille privilégiée, celle que je regarde quand je suis sur scène au milieu des groupies en délire, enfin tu pourrais devenir ma muse, oui, comprends bien, je te ferai cet honneur, je déposerai à tes pieds, au moins pour une soirée, ma gloire naissance, celle qui va venir, là, dans pas longtemps du tout. Médisances encore, et faussetés, de prétendre que certains garçons s'imaginent qu'un homme qui chante sur une scène, aucune fille n'y résiste.
Non, non, si la souris osait sous-entendre de telles choses, ce serait uniquement parce que c'est une vieille souris à l'oreille terne, aigrie et jalouse du talent des autres.
Mais c'est grande pitié que chaque musicien qui se jette ainsi à la tête de la souris soit... Hem... Enfin, pitié pour les petits poissons, mais la souris aimerait tellement se faire draguer par une vraie star, qui fait de la bonne musique! Ce serait tellement plus drôle, oui, de lui expliquer tout cela.
Evidemment, c'est toujours dans ces moments-là qu'une personne sans cervelle vient se coller dans la mêlée avec un objet encombrant - armoire à glace portative, ratelier à fusils, diplodocus à bascule, drapeau de la CGT, bouée gonflable gonflée. Ce soir-là, l'objet encombrant était un instrument de musique, et la personne sans cervelle était la souris.
Evidemment, la souris fut aussitôt détestée par toutes les personnes de son environnement physique immédiat. Toutes? Non! Un petit jeune homme résistait encore et toujours à l'énervement métropolitain. Parce qu'un instrument de musique volumineux, c'est non seulement un appel à la lapidation publique dans le métro aux heures de pointes, mais aussi pain bénit, cadeau, accroche offerte à tout dragueur à la noix. Deux bonnes raisons de choisir l'harmonica.
Pourtant, celui-ci était gentil, courtois et désireux de tout, tout, tout savoir sur l'instrument de la souris, son accordage, la notation, est-ce que ça se joue en groupe, tout ça tout ça. Parce que - à ce moment, une petite carte de visite bariolée surgit avec la rapidité de l'éclair dans sa main qui à aucun moment n'avait semblé bouger - lui aussi, il faisait de la musique. Et il était désireux, oui, ô combien désireux d'avoir l'avis de la souris sur sa musique.
Ah mais pas n'importe quelle musique, attention. De la musique en live. De la musique sur scène. De la musique avec groupies en délire. D'ailleurs, c'était marqué à peu près partout sur la petite carte de visite: "avec groupies en délire". La pose du jeune homme sur la photo, la typographie, le choix du pseudonyme, tout convoquait l'imaginaire de l'artiste à groupies en délire.
Oh, ce serait mesquin, bien sûr, de sous-entendre que certains garçons (ou filles d'ailleurs) font de la musique uniquement pour avoir un fan-club, et choisissent les titres de leurs chansons, les visuels de leurs clips, le romanesque de leurs thématiques comme autant de pièges à glue pour le sexe opposé. Tout aussi mesquin, bas et déloyal de supposer que les mêmes se baladent toujours avec une bonne provision de cartes de visites dans leur poche, clignotant de l'adresse de leur site, leur myspace, leur msn, leur mail, et les tendent comme une faveur spéciale à de futures potentielles groupies en délire, avec un air généreux, car toi, oui, toi, tout spécialement, tu pourrais être choisie par moi pour être, oui, toi, tu as bien compris, celle pour qui je chante, mon oreille privilégiée, celle que je regarde quand je suis sur scène au milieu des groupies en délire, enfin tu pourrais devenir ma muse, oui, comprends bien, je te ferai cet honneur, je déposerai à tes pieds, au moins pour une soirée, ma gloire naissance, celle qui va venir, là, dans pas longtemps du tout. Médisances encore, et faussetés, de prétendre que certains garçons s'imaginent qu'un homme qui chante sur une scène, aucune fille n'y résiste.
Non, non, si la souris osait sous-entendre de telles choses, ce serait uniquement parce que c'est une vieille souris à l'oreille terne, aigrie et jalouse du talent des autres.
Mais c'est grande pitié que chaque musicien qui se jette ainsi à la tête de la souris soit... Hem... Enfin, pitié pour les petits poissons, mais la souris aimerait tellement se faire draguer par une vraie star, qui fait de la bonne musique! Ce serait tellement plus drôle, oui, de lui expliquer tout cela.